Introduction
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Survol de la campagne chinoise (03/2009) / Musée urbain de Chengdu (Sichuan) (07/2016) © JA.
Du plan des villes à l'investigation cartographique
L'intérêt pour l'écriture et la lecture des cartes doit beaucoup à une réflexion menée de longue date sur le plan des villes. Ce n'est donc pas la connaissance extensive du territoire qui a motivé en premier lieu cette recherche mais l'attention portée à l'immense variété des plans, lesquels révèlent, par-delà les modèles légués par l'histoire des villes, une relation chaque fois singulière de ces villes au sol sur lequel elles sont établies et au paysage qui leur sert de milieu environnant.
Ce n'est pas le plan qui explique la ville, mais la ville qui explique le plan. Cette position de principe, aussi longtemps qu'elle est fermement tenue, permet d'échapper aux illusions de la planification. Elle ouvre en revanche une réflexion sur la dynamique des villes, moins attachée aux tracés généraux qu'aux réponses particulières que chaque ville apporte aux sollicitations de sa topographie, de son hydrographie et de sa propre culture spatiale. Celle-ci est à la fois géographique et anthropologique, elle possède une haute valeur expressive : elle codifie le rapport des sociétés urbaines au sol sur lequel elles sont établies.
C'est pourquoi le plan reconduit à la carte. De celui-là à celle-ci, le rapport entre les deux n'est pas seulement un rapport d'échelle, ni ne se réduit au passage du détail métrique à des formes de généralisation graphique fatalement moins exactes.
La carte a une fonction heuristique : elle est un instrument de recherche, ce n'est pas seulement une « représentation »
Sa fonction symbolique originale lui vient de l’association de plusieurs régimes de signes. Elle est faite d'images, de diagrammes et de noms. Elle appartient au vaste monde de l’idéographie.
Elle est l’expression graphique d’une culture de l’espace. Quels que soient les systèmes de normes qui régissent la relation des sociétés à l’espace, la carte est d'abord écrite et dessinée, et selon des conventions éminemment variables. Elle s'incorpore simultanément ou alternativement à l'univers de la science et à celui de l'art.
La carte n'est ni le territoire ni le paysage, mais elle en déchiffre les formes et les strates, elle traduit les modes d'inscription à travers lesquels les sociétés signifient leur rapport au sol et à l'espace. Elle y reconnaît les marques du temps. Elle aide à connaître les asymétries fondamentales de l'espace habité, elle en évalue les potentiels. Les traces, les tracés, les trajets y sont autant des héritages que des avant-courriers.
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