Marseille


Marseille, France


Le centre de Marseille, durant des décennies, n’a pas connu de rénovation. Il s’est naturellement délabré. Alors que le nouveau quartier d'affaires de la Joliette est sorti de terre, des immeubles s’effondrent rue d’Aubagne, au cœur cosmopolite et populaire de la ville. Ces catastrophes sont tout sauf fortuites.

Marseille multiplie cependant les actions de requalification architecturale et urbaine. Elles s'inscrivent dans une quête d’attractivité, typique des villes post-industrielles. Elles obéissent aux tendances de l'époque : dynamique de polarisation des flux, intensification des interactions : métropolisation.


Autrice : Lola Alimi

Titre : Marseille, une centralité disloquée

Année : 2020

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Voir aussi : Laura Piazza d'Olmo : Marseille, une ville entre mémoires matérielles et immatérielles : * (2019)

Ainsi que : Claire Gaudron : Marseille, le GR2013, tentative d’incarnation du territoire de Marseille-Provence : * (2013)

Et : Guillaume Richaud : Marseille, le nord marseillais, un territoire en mutation : * (2011)

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Carte exposée : Marseille : photomontage de Lola Alimi
Ci-dessus (de haut en bas) : Carte sensible illustrant les ambiances des différents arrondissements de Marseille, réalisée par Laura Piazza d'Olmo, à partir des photographies de Bruno Boirel, Jean Paul Cotte, Lisa Ricciotti et Sébastien Rollandin.
Carte des immeubles sous arrêté de péril > Même carte avec, par superposition, les pôles désignés d'attractivité territoriale.
Carte des densités sur le territoire de la Métropole Aix-Marseille-Provence.
Deux portraits de ville. Pastels de Lola Alimi.


Les huit victimes des effondrements de la rue d'Aubagne s’appelaient Simona, Pape Magatte, Marie-Emmanuelle, Ouloumé, Julien, Fabien, Tahar, Chérif. Simona Carpignano était italienne, originaire de la région des Pouilles et linguiste de formation, elle parlait le français, l’arabe et le wolof. Elle avait 30 ans et venait d’obtenir un master d’économie sociale et solidaire à la faculté d’Aix-Marseille. La nuit précédant le drame, elle avait accueilli un ami sénégalais de 26 ans, Pape Magatte Niasse, qui avait rejoint l’Europe au cours de l’automne 2018. Marie-Emmanuelle Blanc avait 55 ans et était artiste verrière. Grande voyageuse, elle avait posé ses valises à Noailles depuis plus de dix ans. Ouloumé Hassani était une mère de 54 ans, originaire des Comores, et travaillait dans un restaurant, rue d’Aubagne. Elle était installée depuis 2015. Julien Lalonde-Flores était un franco-péruvien de 30 ans. Conférencier, il s’était installé à Marseille en octobre 2018 dans un logement qu’il souhaitait provisoire. Fabien Lavieille était un artiste peintre de 54 ans, veuf et père d’un enfant. Enfin, Cherif Zemar et Tahar Hedfi étaient des amis d’un des occupants de l’immeuble qui s’est effondré. Ils ont dormi chez lui la nuit du 4 au 5 novembre 2018. Cherif Zemar était un Algérien de 36 ans. Tahar Hedfi était un Tunisien de 58 ans qui vivait également à Noailles depuis quelques années.

Ci-dessus : L'effondrement des immeubles, rue d'Aubagne, le 5 novembre 2018. (© Libération)

Vous qui êtes médecin, essayez de prendre le pouls de Marseille. Il est inquiétant : entre des battements bien frappés, parfois tout s’arrête puis reprend faiblement. Diagnostic ? Traitement?

Comment concevoir la planification urbaine dans les villes d’aujourd’hui ? Que le territoire soit malade ou en pleine santé, le traitement est souvent le même : intensification des flux et enrichissement à tout va. L’urbain est devenu une plateforme de service, plus seulement pour ses habitants mais pour l’économie mondiale.

Ambition nationale, réforme territoriale, fondation métropolitaine, transfert de compétences, etc. Les injonctions économiques des politiques urbaines se ramifient et surpassent le seul souci d’un développement municipal endogène. À Marseille plus qu’ailleurs, les ambitions sont vastes et le socle peu solide. C’est ainsi que certains quartiers du centre-ville sont devenus les points névralgiques d’une urbanisation aveugle.

N'est-il pas temps d’assumer l’incertitude dans les ordonnancements urbains ? D'accepter une forme d'ignorance, de la part des “médecins” de l’urbanisme contemporain ?

L'idée de centralité, si vantée dans les villes françaises, n'est peut-être qu'un leurre. La multi-polarité métropolitaine est devenue le nouveau principe de structuration urbaine, cohérente avec l’expression de la performance économique des villes. La centralité n'est plus désormais que relative et fragile.


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