Projet POPSU
POPSU-Territoires : réponse à l'appel à projets de 2020.
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STEENVOORDE, EN FLANDRE.
PERCEPTION DES RISQUES CLIMATIQUES
ET CAPACITES DE RESILIENCE AU PAYS DES GEANTS.
Présentation générale.
Steenvoorde (4 400 hab. env.), dans le département du Nord, bénéficie d'une situation géographique caractéristique, sur l'axe de l'autoroute A25, à équidistance de la Métropole européenne de Lille et de la Communauté Urbaine de Dunkerque. Elle marque, par son paysage, l'entrée dans la Flandre maritime, immédiatement au nord de la ligne des Monts de Flandre. Le nom même de Steenvoorde (en flamand : pierre de gué) souligne la réalité de ce seuil paysager.
Les échelles démographiques de la petite ville, de sa communauté de communes, de ses coopérations régionales.
Petite ville de milieu rural, elle est insérée entre plusieurs échelles territoriales qui forment le substrat d’un système interurbain, fait de tout un réseau de villages, de villes moyennes, de pôles de premier plan. Steenvoorde, au milieu du « Pays des Géants » (quelque 10 000 habitants dans la ville et ses six villages voisins), appartient à la Communauté de communes de Flandre Intérieure (CCFI), elle-même composée de 50 communes, peuplée d'un peu plus de 100 000 habitants – à comparer aux presque 200 000 habitants de la Communauté Urbaine de Dunkerque… et au 1,2 million d’habitants de l’aire métropolitaine de Lille. La CCFI comprend la ville de Hazebrouck (> 22 300 hab.), ainsi que les pôles urbains de Bailleul (> 14 800 hab.) et de Nieppe (7 500 hab. env.). Steenvoorde (4 400 hab. env.), 4e ville par ordre d'importance démographique, se trouve à la fois sur l’axe qui relie la capitale régionale au littoral de la mer du Nord et sur celui qui rejoint, depuis Saint-Omer et Cassel, la frontière belge et les villes de Poperinge et Ypres. Par son système de routes et ses zones d’activités, elle est un carrefour. Par son système hydrographique, elle est au cœur d’un réseau dense de cours d’eau : fossés de drainage et petites rivières (les becques), sur le bassin versant de l’Yser. Dans ce paysage de plaine et à l’heure du changement climatique, la question de la gestion de l’eau est considérée comme une priorité de l’action publique. Au titre de son appartenance à la CCFI, Steenvoorde est partie prenante de l’Union syndicale d'aménagement hydraulique du Nord (USAN), exerçant au nom de la Communauté de communes les compétences de « gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations » (GEMAPI).
Par ailleurs, la Ville de Steenvoorde est lauréate du projet régional « cœur de villes de la région des Hauts de France » : https://www.hautsdefrance.fr/categorie/dossiers/redynamisation-des-centres/. (Aide allouée à hauteur d'un million d'euros.)
Enfin, le Conseil départemental du Nord prête son concours à la Ville, dans le cadre du programme « Villages et bourgs » (aides aux projets communaux, pas seulement sur les dossiers d'urbanisme) : https://lenord.fr/jcms/pnw_9446/les-aides-a-l-amenagement#villageetbourgs.
Steenvoorde reçoit, par l’intermédiaire de sa Communauté de communes (CCFI), l'appui technique (et gratuit pour elle) de l'Agence d’urbanisme et de développement Pays de Saint-Omer – Flandre intérieure. La Ville s’est engagée avec cette agence dans une démarche participative pour l'attractivité du centre-ville : https://www.aud-stomer.fr/
L’engagement des élu.e.s et le choix d’une problématique partagée.
Le Maire de la commune, conseiller régional des Hauts de France, ainsi que sa Première adjointe, chargée du développement durable, de la citoyenneté et de la culture, se sont formellement engagés à accompagner l’étude de cas, objet de la présente proposition. Dès nos premiers échanges, la question du risque majeur d’inondation a été évoquée. Parallèlement, les élu.e.s attirent l’attention de l’équipe sur les patrimoines matériels et immatériels, défendus par un dense réseau d’associations (1000 adhérents d’associations pour une population d’un peu plus de 4000 habitants). Le « récit territorial » prend la forme à Steenvoorde d’une multitude d’initiatives – artistiques, artisanales, agricoles, entrepreneuriales, commerciales – qui toutes ensemble participent à la culture nordique toujours vivante du « Pays des Géants ». La forte capacité de mobilisation des habitants de Steenvoorde sur les sujets intéressant la collectivité amène à mettre en relation la perception des risques environnementaux et les capacités de résilience d’une population très active et attachée à son territoire. Les élu.e.s ont répondu très favorablement à notre souhait de contacts avec différentes personnalités de la Ville ; il/elle faciliteront les entretiens que nous nous attacherons à recueillir. Ils mettront une salle de réunion à la disposition de l’équipe.
La problématique de l’étude de cas.
Steenvoorde se situe au seuil d’un territoire directement exposé aux conséquences les plus probables du changement climatique. Au cœur d’une plaine inondable, elle est menacée par les crues et le débordement des becques. Celles-ci sont les témoins d’un vaste système hydraulique, qui assure à travers la Flandre, très proche du niveau de la mer, la chasse de l’eau vers les rivières, les canaux et les ouvrages exutoires. Les crues récurrentes de la Lys, sur le piémont des Monts de Flandre sont un rappel insistant de cette vulnérabilité climatique. Si la perspective d’effets catastrophiques est prise en compte, une analyse fine doit permettre de connaître les zones qui seront touchées et la temporalité dans laquelle s'inscrivent ces épisodes annoncés. L'anticipation doit alors permettre de faire des choix qui relèvent de stratégies d'évitement ou de transformation. Les zones concernées peuvent être « abandonnées » (absence d'activités, d'habitat…) ou des aménagements peuvent être réalisés pour permettre la continuité des activités et la sauvegarde des habitants. C'est typiquement un choix qui a des incidences sur l'économie d'un territoire, sur ses usages, sur sa circulation, sur son paysage. La prospective commence par faire face à des alternatives de cette nature. La présente proposition d’étude de cas s’attache à relier deux ordres de faits impliquant solidairement les habitants : la perception du risque majeur d’inondation, mais aussi les capacités de résilience collective, estimées à partir de la vitalité associative de la population et de l’engagement des élu.e.s à toutes les échelles du territoire (municipal, communautaire, régional, transfrontalier). Le risque environnemental et les capacités de résilience des habitants de Steenvoorde ont été d’ores-et-déjà soulignés par les interlocuteurs avec lesquels s’est engagé le dialogue. L’étude de cas se distingue nettement des expertises techniques auxquelles il est fait appel pour établir des prévisions ou formuler des préconisations. Le projet de recherche-action consiste, lui, à enquêter sur le degré de perception par les habitants du risque écologique et, par-delà la politique de prévention (PPRI), sur les réponses collectives auxquelles s’apprêtent aussi bien les élu.e.s que les associations d’habitants.
Le dispositif de valorisation et d’association des acteurs et actrices du territoire.
L’équipe, spécialisée dans l’édition d’atlas des villes, créera des documents topographiques et hydrographiques, constitutifs d’une cartographie originale par ses cadrages, ses échelles, ses résolutions de détail, son écriture graphique. Cette cartographie aura pour objectif de permettre de formuler des conjectures sur le devenir de ce territoire, considéré à différentes échelles de pertinence. Les documents réalisés feront l’objet d’un cahier des charges précis, première étape de la recherche et du dialogue avec les partenaires locaux. Il est prévu des représentations en coupe des différents profils de sols et de pentes ; des restitutions de parcours géo-localisés ; des séries de photographies documentaires et artistiques ; des textes de transcription des entretiens réalisés avec les interlocuteurs, élus, techniciens, responsables d’associations, habitants ; un essai destiné à effectuer la « montée en généralité » attendue par l’appel à projets. L’ensemble sera préparatoire à la réalisation d’un ouvrage grand public. Tous les matériaux recueillis (entretiens ; ateliers participatifs en association avec l’école supérieure d’art de Dunkerque ; stages dans les exploitations agricoles) serviront à la production d’une exposition destinée à la Ville, et préluderont à l’édition d’un atlas prospectif.
Petite ville et vicinalité.
Du point de vue de la pertinence géographique, la recherche ne vise pas à remonter l'échelle hiérarchique des villes depuis les périphéries rurales vers les centres urbains. Il s’agit plutôt de construire une vision moins hiérarchique, c'est-à-dire fondée sur les micro-réseaux et la vicinalité. Il faut arracher la petite ville à une polarité excessive qui ferait dépendre le destin de ses habitants du seul système constitué par les grands attracteurs métropolitains — au prix de l'oubli des fonctions propres aux petits territoires ; au prix aussi d'une négligence : celle des forces de résilience locale face aux risques encourus du fait du changement climatique et des situations de crise. Les notions de campagne et de milieu rural sont des notions écran : elles décrivent au mieux une situation dans un paysage naturel élargi, elles ne disent rien — ou si peu — de la réalité de la vie sociale ni du système de relations qui la structure. L’agriculture ne représente plus qu’une petite fraction de l’activité, tout en étant entraînée dans les processus de mutation qui accompagnent la transition écologique. Un examen attentif de la répartition des emplois dans la population active montre la réalité multiforme de cette situation urbaine, en dépit de son échelle démographique et spatiale réduite. Le milieu rural de la petite ville cumule une variété de fonctions qui lui sont propres : agriculture mais aussi industrie (agroalimentaire : Bledina-Danone, par ex.) ; commerce local mais aussi zones d'entreposage (zone logistique importante, à proximité de l’échangeur autoroutier) ; migrations alternantes mais aussi activités locales ; tourisme mais aussi mouvements des populations de réfugiés, à proximité de Calais, de Gravelines et de Dunkerque. La petite ville de milieu rural est riche de sa propre diversité fonctionnelle et de la vitalité de sa société.
Une petite ville typique, dans son intercommunalité et ses coopérations régionales.
La « petite ville » de Steenvoorde sait défendre une vocation qui lui est propre : elle ne subit pas seulement l’attraction de la métropole ou des pôles urbains du littoral à l’intérieur de leurs « bassins d’emploi ». Elle est aussi un lieu d’élection, motivant le choix d’une installation durable des ménages et suscitant une multitude d’activités sociales et culturelles locales. Les mobilités, par exemple, ne sont pas réductibles aux mouvements pendulaires entre résidence et lieu de travail. Elles sont impliquées par les lieux de vie sociale et culturelle disséminés à l’intérieur du périmètre de la communauté de communes (la Flandre intérieure), voire de tel ou tel de ses territoires voisins. La petite ville de milieu rural est d'abord une ville en mouvement. La CCFI a approuvé en janvier 2020 son Plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi), ainsi que son Plan d'aménagement et de développement durables (PADD). L'ensemble des documents publiés à cette occasion — près de deux mille pages — fournit une base de travail exceptionnelle. L'exploitation de ces documents et les perspectives qui y sont ouvertes forment en soi un sujet de recherche et d'action, dès lors qu’est posée la question de l’appropriation partagée des orientations et objectifs fixés à l’échelle des intercommunalités. Le Syndicat mixte Flandre et Lys, et le Groupement Européen de Coopération Territoriale (GECT) West-Vlaanderen / Flandre / Dunkerque / Côte d’Opale, définissent un cadre coopératif qui situe la politique locale par rapport à des enjeux partagés à l’échelle de l’ensemble de la région et de son littoral.
Un récit territorial fondé sur la perception des risques et sur la résilience…ordonné à un projet éditorial.
L’une des premières préoccupations des élu.e.s de la Ville de Steenvoorde porte aujourd’hui sur le risque majeur d’inondation de la plaine de Flandre, par débordement de son système hydrographique particulièrement dense et ramifié (classement de plus de 300 maisons en zone rouge au Plan de Prévention des Risques d’Inondation – PPRI). Les deux questions de la perception du risque et de l’estimation des capacités de résilience face à des situations de péril, place le projet de recherche-action dans une vision explicitement tournée vers le futur probable. L’approche est celle d’un atlas, dans sa dimension collaborative (il recueille les contributions des élu.e.s, des responsables d’associations locales, des chercheuses et chercheurs), prospective (il fonde ses conjectures sur la compréhension d’une culture socio-spatiale ; il définit des alternatives et esquisse des choix possibles), et éditoriale (il associe création cartographique, représentation photographique et tentative de généralisation théorique, dans le but d’une exposition puis d’une publication). Le caractère prévisible de la catastrophe (même s’il est possible de la retarder) met en avant l'obligation d'anticiper : gouverner, c'est prévoir. Comment, à cette échelle de territoire, est-il possible de responsabiliser les citoyens alors même que le fatalisme ou le déni exercent leur pression inhibitrice ? Comment impliquer les individus d’une collectivité restreinte alors que la problématique s'inscrit à une échelle et à des niveaux de responsabilité qui sont régionaux, voire universels et planétaires ? Est-il concevable de considérer que la présence de l'eau et la modification des territoires pourraient être « un atout », pour ne pas dire « une chance » – et de sortir ainsi du catastrophisme ? Le choix imposé d'une autre gestion des territoires impliquerait de nouveaux usages, de nouveaux modes de fonctionnement, de déplacement, de répartition et donc, inévitablement et dans un temps record à l'échelle de l'humanité, une autre culture. Le rapport au temps est déterminant pour que les habitants, les territoires puissent être acteurs de la résilience. Comment donc penser son territoire sous l’horizon du risque et de la crise ? Sur un territoire d'agriculture et d'élevage, mais aussi d’industrie et de commerce, les valeurs d’attachement à la terre et à ses paysages ne peuvent être transmises qu’à travers la recherche d’alternatives. Les traditions culturelles du « Pays des Géants » peuvent en être le foyer et le ressort.
La préparation de la restitution des résultats aux habitants.
L’équipe, forte de son expérience dans l’édition en ligne d'un atlas des villes, créera des cartes originales, des séries de photographies documentaires et artistiques, des textes de nature à préparer la réalisation d’un ouvrage grand public. Tous les matériaux recueillis (entretiens ; ateliers participatifs en association avec l’école supérieure d’art de Dunkerque ; stages dans les exploitations agricoles) serviront à la production d’une exposition destinée à la Ville, et préluderont à l’édition d’un atlas prospectif. Les liens personnels noués localement avec maints responsables d’institutions artistiques et culturelles sont un gage de bonne mise en forme des restitutions publiques qui seront proposées.
La composition de l’équipe, sa méthode de travail, son environnement scientifique.
L’équipe candidate regroupe des enseignants-chercheurs, de jeunes professionnels du monde de l’architecture, de l’urbanisme et du paysage, des artistes, des théoriciens. Ils/elles sont réuni.e.s par un intérêt commun pour la production d’atlas des villes, un format éditorial réunissant cartes, photographies et textes, au service d’une vision prospective et partagée des territoires d’étude. Ces atlas ont pour vocation une expression à plusieurs voix, une écriture à plusieurs mains : après que leur formule en a été élaborée au sein des écoles d’architecture, ils trouvent dans le principe même de la recherche-action leur cadre le plus approprié : dialogue, production de connaissances et de représentations nouvelles, partage des points de vue, recherche de la meilleure expression commune, de la meilleure restitution au public. Ce projet de recherche-action est présenté sous l’égide de la Chaire partenariale de recherche et de formation « Métropoles et Architecture des Grands Évènements » - Chaire MAGE (Cristiana Mazzoni, directrice). L’objectif de cette Chaire est d’associer enseignants-chercheurs, acteurs publics, parapublics et privés, professionnels de l’architecture et de l’urbanisme, autour des problématiques liées aux grands évènements qui impactent les territoires par des flux inédits et de courte durée. Ils incluent explicitement les événements d’origine climatique, telles les grandes marées, les inondations, les crues. La chaire MAGE vise à créer une dynamique de coopération scientifique et industrielle en France et à l’étranger. Elle vise à interroger en particulier les processus liés à « l’urbanisme des cycles de vie » et à des « formes innovantes de gouvernance des projets ». Ses partenaires scientifiques co-fondateurs sont l’ENSA Paris-Belleville ; The College of Architecture and Urban Planning (CAUP) de l’Université de Tongji, à Shanghai ; l’UMR AUSser (MC-CNRS 3329).
Le cadre scientifique dans lequel sont menés les projets de la Chaire MAGE est le « Lab R&D : Explorations théoriques, expertise, innovation », annoncé comme nouveau dispositif transversal du projet scientifique de l’UMR AUSser (2020-2024). Plateforme expérimentale permettant des actions à la croisée entre recherche fondamentale et recherche appliquée, le Lab R&D fait converger les travaux menés dans le cadre des chaires proposées dans les écoles d’architecture parisiennes, en lien avec l’UMR AUSser. Un lien étroit est recherché notamment avec la Chaire « Nouvelles urbanités face aux risques naturels » de l’ENSA Paris-La Villette et la Chaire « Le littoral comme territoire de projets » de l’ENSA Paris Est. Notre équipe de projet est animée par la conviction que les questions de transition écologique et de résilience urbaine sont inscrites en profondeur sur le sol des villes et des campagnes, base de toute investigation cartographique. Nous partons du principe selon lequel la « culture de l’espace », dès lors qu’elle est partagée, permet de former des conjectures sur le devenir d’un territoire. Les cartes sont un medium efficace pour l’organisation de rencontres avec les habitants et la tenue d’ateliers participatifs. Elles sont particulièrement aptes à favoriser l’expression d’un « nouveau récit territorial », à aider à le mettre en forme.
L’édition du travail commun se fait de manière continue grâce à un site partagé et à ses pages dédiées. Ce site se construit par la mise en ligne régulière de documents originaux et au fil d’un journal de travail, mis à jour en temps réel.
Voir : http://www.atlasdesvilles.net/atlas2/enseignant/jean_attali/philosophie_et_cartographie/atlas_de_dunkerque/journal [Codes d’accès à la plate-forme : log. : atlas / mot de passe : villes]